jeudi 2 juillet 2015

Love & Pop - Murakami Ryû.

222 pages.

Auteur: Murakami Ryû
Edition: Piquier Poche (2011)
Première publication: 2009
ISBN: 978-2-8097-0284-2
Genre: Drame, Contemporaine, Roman

Résumé:
Love & Pop aborde une forme de prostitution propre au Japon, dont Murakami avait déjà fait le sujet troublant de son film Tokyo Decadence. Par l'intermédiaire de messageries téléphoniques, de jeunes lycéennes acceptent des rendez-vous avec des inconnus pour pouvoir s'acheter des produits de marque. Le roman raconte la journée d'une jeune fille qui, désirant absolument s'offrir une topaze impériale, accepte coup sur coup deux rendez-vous avec des hommes. Mais les rencontres ne vont pas se passer comme elle l'avait prévu. La littérature n'a que faire des questions de moralité, dit Murakami Ryû, qui a construit son roman à la manière d'une œuvre d'Andy Warhol, en fondant dans la narration des bribes de conversations, d'émissions de radio ou de télévision, des litanies de marques, de titres de films ou des paroles de chansons à la mode. Comme un bruit de fond faisant soudain irruption au premier plan pour saturer le sens de ces rencontres qui ouvrent sur tous les possibles de l'humain. Tandis qu'une violence latente se fait de plus en plus pressante et précise.


Avis:
Love & Pop est une lecture abandonnée il y a longtemps et qui a resurgi dans mes mains un peu par hasard, en fouinant mes cartons-bibliothèques.
Et au final... Je ne suis pas déçue de l'avoir lue. C'est une lecture qui laisse perplexe par le style et la forme employé par l'auteur, deux éléments qui peuvent surprennent et déstabilise, mais dont on s'accoutume finalement. C'est une lecture qui renvoie une réalité et un phénomène de société qui sont très courant au Japon, mais dont on en entend peu parler à l'étranger: les rendez-vous arrangés. 

Dans ce roman, nous suivons Hiromi, une novice dans ce domaine, qu'elle connaît et côtoie par ses amies. Toutes aiment aller à Shibuya pour fantasmer sur des objets de marques et hors de prix dans les vitrines, des filles qui aiment la mode, les bijoux. Mais ne pouvant financièrement pas se les payer, elles acceptent alors des rendez-vous arrangés avec des inconnus. En échange d'une heure au karaoké ou de deux dans un love hotel en leur compagnie, ceux-ci proposent de leur acheter tout ce dont elles ont envie, ou offrent simplement une somme d'argent. Dans le cas de Hiromi, qui acceptera coup sur coup deux rendez-vous arrangés, seule, les choses ne se passeront pas comme prévu...
Autant qu'on se le dise, c'est un roman assez voyeur, dérangeant, on entre dans l'intimité des personnages, mais surtout dans des tabous de la société japonaise, et l'on observe les nombreux paradoxes qui la composent à travers l'oeuvre de Murakami. Celui-ci dit ne pas avoir voulu faire un livre moralisateur, mais je trouve néanmoins que celle-ci est plutôt assez présente, via certains personnages, notamment celui de Captain Eo.
Comme le précise le résumé, au fur et à mesure de notre lecture, on sent que quelque chose va mal tourner, car il s'agit d'un univers malsain, glauque et triste. Dans la société japonaise, les sentiments et les preuves d'affections sont presque tabous, les gens sont très pudiques. Paradoxalement, être avec une personne du sexe opposé (et avec une certaine différence d'âge parfois) pour de l'argent contre du sexe ou de la compagnie, ne pose nullement problème. C'est assez déroutant, car on s'aperçoit que ce n'est pas parce que les concernés sont des obsédés, des intéressés ou des personnes malsaines, mais plutôt des personnes ignorantes, dont on a privé le savoir de certains dangers. On voit également les "ravages" de la solitude, une position qui semble renvoyer une image très négative d'une personne. Ce sont des aspects de la société qui sont assez méconnus de ce pays, à l'étranger, où l'on l'assimilera plutôt à une population intelligente, gentille, accueillante et sans tabous. Le fait que ce livre nous fait avoir un nouveau regard sur cette société où "l'habit fait le moine", finalement, est vraiment intéressant.

Au fur et à mesure de la lecture, je n'ai pas cessé de penser "Oh là là, Hiromi, dans quel pétrin t'es-tu fichue?!". Bien que je n'ai pas toujours compris sa manière de penser,d'agir, de réfléchir, je me suis assez attachée à elle pour avoir peur qu'il lui arrive vraiment quelque chose de grave. J'ai trouvé son personnage incroyablement triste, car à la fois naïve, inconsciente et ignorante des dangers auxquels elle s'exposait, face à certaines actions, certaines paroles pensées ou dites. Quant à Uehara et Captain Eo, ce sont des personnages qui m'auront laissé perplexe, ils sont plutôt difficile à cerner. 
J'ai bien aimé également les nombreuses références à la culture nippone qui truffent ce roman. En parlant de références, l'oeuvre de Murakami m'a donné envie de voir son film, sur le même thème.

Love & Pop est une lecture déstabilisante, de par sa forme et son thème, à visée voyeuriste sans être vraiment moraliste sur un phénomène de société particulièrement courant au pays du soleil levant. Une lecture intéressante, qui change notre regard sur cette population et ses moeurs, et qui nous fait s'interroger sur les interactions et valeurs humaines, à travers l'aventure d'Hiromi.
Une lecture qui ne pourra pas correspondre à tous types de lecteurs à mon avis, (public plutôt averti même, notamment du à certains passages) mais qui reste toutefois un début plutôt positif sur la littérature contemporaine japonaise! 


"Hiromi crut comprendre. Comprendre pourquoi un homme aussi bien que Captain Eo, celui qu'elle avait devant elle, utilisait les services d'une messagerie. Elle avait beau le regarder, ce n'était pas, à 25 ans, le genre de garçon à se trouver en mal de filles. Alors pourquoi achetait-il des filles? Sans doute parce qu'avec une fille qu'il ne paierait pas, avec une fille dans une relation ordinaire , il serait difficile à un homme de se mettre soudain à parler d'une peluche. Il le cacherait, sans doute. Hiromi prit conscience pour la première fois qu'elle était une fille qu'on avait achetée avec de l'argent."






5 commentaires:

  1. J'en avais déjà entendu parler, mais je ne l'ai pas lu. Ta chronique me donne envie, je vais l'ajouter à ma wish list ;)

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    1. Ah! Où en as-tu déjà entendu parler? Je ne me souviens pas que ce roman avait fait grand bruit!
      En tous cas, je suis curieuse de ce que tu en penseras, lorsque tu le liras! ^^

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    2. Je ne sais plus trop où, mais je crois que j'avais lu un avis assez négatif, mais comme le tien est positif, il faudra que je me fasse mon propre avis pour voir ^^

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  2. Je me rappelle avoir ressenti un grand sentiment de solitude dans ce livre !

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    1. Je comprend tout à fait ton sentiment de solitude!
      L'auteur fait une "simple" observation d'un phénomène particulier, on se sent tout bizarre après ça...
      Je me souviens que j'avais également éprouvé une grande solitude et une grande tristesse pour les personnages, parce qu'on ne peut pas vraiment les blâmer. Et puis... pour chacun d'eux, c'est un peu triste de se sentir si seul qu'il faut louer les services d'une lycéenne. Et c'est triste pour ces lycéennes de devoir se "prostituer" plutôt que d'accepter une aide financière de la part de quelqu'un, surtout pour un objet dont elle sait elle-même qu'elle ne désirera plus quelques heures/ jours plus tard, si elle ne l'achète pas sur le coup...

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